10 mois

et quelques jours…

Cette fois ci, j’étais bien décidée à ne pas l’écrire cet article, n’ayant rien à dire. De la même façon que j’avais décidé de lutter contre moi-même et de griller le fameux stop qui ne sert à rien ce soir (pour ceux qui se rappellent ici).

Mais il se trouve qu’une voiture a pris la rue en sens interdit et que en grillant le stop, j’ai failli me la prendre de plein fouet. A 1h du mat, sans un chat dans les rues, c’est tellement improbable que je ne peux faire autrement que d’ y voir un signe de l’univers (qui m’envoie des messages en ce moment oui oui oui!) qui me dit de ne pas lutter contre ce que je suis!

En tout cas, là tout de suite à 2 heures du matin, cette symbolique me parait tellement éclatante que je trouve primordial de partager le constat que comme le dit celle qu’il y a de nombreuses années à la même date (oui c’est ma semaine des célébrations personnelles et des dates anniversaires qui me font un peu disjoncter je crois) j’écoutais chanter au Stade de France : »on ne change pas, on met juste les costumes d’autres sur soi »

enfin moi jme comprends ….

Et en plus, moi qui adore les chiffres ronds, le compteur des visites vient de passer à  100  000! Jsais pas ce que ça représente mais c’est joli!

Y’a-t-il un médecin dans l’avion?

Il y a quelques jours, j’étais dans l’avion et mon mari me signale au loin des jambes en l’air, ce qui n’est pas tout à fait normal, d’un blanc cadavérique louche. Il me dit « faut qu’t’y ailles t’es docteur! » « Je lui dis ça va pas, elle doit faire du yoga… »

Une fois, ils ont vraiment appelé un docteur dans l’avion, je dormais tranquille, il me secoue: « Eh, ils appellent un docteur » « Et alors? » « Ben t’es docteur! » « Ah merde! ».

Après quelques secondes de réflexion dans les brumes de mon sommeil, je me suis dit que ben fallait que j’y aille, je me lève, rattache mon pantalon et me dirige en chausettes à l’avant de l’avion et j’arrive la gueule enfarinée: « Euh jsuis médecin, vous avez appelé un médecin » « Non c’est bon, trois médecins se sont déjà présentés! »

Forcément, vu mon temps de réaction… Cool, je retourne me coucher!

Oui, c’est palpitant comme histoire, ça valait la peine de la raconter. En lisant le titre, vous vous attendiez sûrement à ce que je raconte comment j’avais sauver la vie d’un passager à l’allure de Brad Pitt en lui faisant du bouche à bouche ou comment j’avais remis une épaule luxée en lui donnant des grands coups de guide du routard…mais non!

Il y en a peut-être qui adorent les situations héroiques et qui ont toujours un stylo bille sur eux au cas où ils devraient faire une trachéotomie en urgence mais moi comme je l’ai expliqué ici ce n’est pas mon cas.

Quand je vois un accident au bord d’une autoroute, je me dis « je suis médecin, ne serais-je pas censée m’arrêter? » Mais bon je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus que les pompiers, à part mettre la personne en position latérale de sécurité et appeler les vrais secours…je n’ai même pas eu mon brevet de secouriste…

Et puis au delà de ça( parce que si je voyais quelqu’un se vider de son sang près de moi sans personne pour l’aider, je m’arrêterai quand-même, je ne lui marcherais pas dessus…) je n’imagine même pas la situation d’arriver quelque part et de dire tout fort « poussez-vous, je suis médecin! »

Il y en a peut-être qui adorent dire d’une voix satisfaite « Bonjour, je suis le Docteur X… Je suis médecin! » Moi faut vraiment me mettre le couteau sous la gorge pour que je dise « euh parce qu’en fait jsuis médecin » d’une toute petite voix!

Pourquoi, je ne sais pas , faudrait que j’en parle à ma psy…Déjà parce que d’une part, probablement je n’aime pas les médecins, comme je l’ai déjà dit, c’est une espèce que je n’affectionne pas particulièrement et à laquelle je ne meure pas d’envie de m’identifier, et puis sûrement que je ne veux pas avoir l’air de me vanter… Mais dire ça c’est encore plus prétentieux, comme si il y avait quelque chose de glorieux à être médecin…

Dans la vraie vie, il vaut mieux éviter de le clamer haut et fort, sinon on est tout de suite assailli de questions médicales mais bon ça c’est la fatalité (cf ici) et puis aussi moins peut-être avec mon grand âge, mais dire mon métier était forcément suivi d’un étonnement voire d’une incrédulité parfois limite vexante.

Mais face au corps médical, en tant que patiente ou famille de patiente , j’ai toujours préféré ne pas le dire d’emblée, du genre jsuis médecin moi aussi avec un sourire de complicité , puisqu’on est de la même espèce supérieure, on se comprend.

Je ne me vois surtout pas introduire ça dans la conversation d’emblée, du genre « bonjour, vous pouvez me parler avec des mots compliqués je suis médecin », je ne sais jamais à quel moment le dire. Du coup, ça mène à des situations ridicules où je laisse parler la personne en langage profane et ou à la fin comme moi je glisse des mots un peu plus médicaux , je finis par dire de ma petite voix « ben oui en fait je suis médecin… » (il y a un médecin qui a fait un article racontant comment il expliquait aux urgences l’infarctus à un patient qui en fait était médecin,il me semblait que c’était Jaddo ou dr foulard mais je retrouve pas et ça m’énerve beaucoup beaucoup si quelqu’un peut m’éclairer!!).

Du coup, cette semaine, j’ai emmené ma fille chez l’ORL sans placer dans la conversation que j’étais médecin…heureusement que ma fille n’a pas dit à la fin « mais maman elle sait, elle est docteur! ou « maman elle a essayé de me déboucher les oreilles mais elle a pas réussi »

Quand c’est judicieux, je le dis quand-même mais du coup parfois ça passe mal, surtout quand c’est en tant qu’accompagnant à l’hôpital. « Oui, on sait que vous êtes médecin …. » Cela doit être écrit  partout  « Sa fille est médecin…sous entendu fait chier le monde » pour que les rares personnes qui ne nous connaitraient pas soient au courant!

Et pourtant, j’essaye de ne pas faire chier le monde, j’ai même laisser parfois des situations limites dangereuses pour ne pas avoir l’air d’être « le médecin qui râle », du coup je râle encore moins que la moyenne, y compris lors de mon propre accouchement pour ne surtout pas qu’on dise que je suis prétentieuse ou emmerdeuse mais vraiment souvent j’ai pas le choix, et même en étant le genre de fille qui ce week-end au centre commercial après s’être fait violence pour demander poliment un siège et que alors que je voyais le tabouret, la dame m’a dit qu’elle en avait pas, a été acheté un tabouret à 4 euros pour pouvoir s’asseoir ( la honte cela dit ), je passe sans doute malgré moi pour la chieuse de service!

Cela dit, j’aimerai tellement que les choses se passent bien et ne pas avoir à râler (cf ici). Bref, changeons de sujet, aujourd’hui, je suis dans un grand désarroi et une certaine lassitude face à une expérience de plus au contact de l’hôpital et des médecins en général.

Ceci explique cela sûrement. Quoi qu’il en soit, c’est toujours difficile de trouver la juste place je trouve quand on est médecin. En tout cas, ça l’est pour moi…

Mais de toute façon, c’est pas grave si je ne dis pas que je suis médecin, il y a toujours quelqu’un pour le dire à ma place…

Faire les courses avec ma grand-mère qui dit à tout le monde « Bonjour, c’est ma petite fille, elle est médecin.. » est une vraie partie de plaisir (du coup j’reste dans la voiture quand elle va à la boulangerie).

Quant à mon mari, atteint lui aussi du syndrôme « j’suis fier, ma femme est médecin », il a réussi à le placer par exemple lors de mon échographie de datation pendant que j’étais partie vider ma vessie. Ah lui, il trouve toujours comment amener le sujet! Remarque, c’est un pipi qui m’a fait faire une économie puisque du coup au nom de la sacro-sainte confraternité avec laquelle je ne suis pas tout à fait à l’aise, je n’ai pas payé l’échographie! (Mais mes patients moins à l’aise financièrement, ils le payent eux le dépassement d’honoraire de 24 euros qui est désormais systématique)

Et même que le con, quand je me suis fait virer énergiquement la semaine dernière en anglais/grec du toboggan aquatique semble-t-il interdit aux femmes enceintes (j’ai réussi quand même à faire deux descentes, moi mère indigne qui ait mangé des sushis hier et fait du trampoline avant-hier), il a osé le  » but she is a doctor »..   .euh non pas là non, c’était pas la peine là…