Faut pas gâcher…

Je suis tombée par hasard sur mon ordinateur sur ce texte qui trainait que j’avais écrit à l’occasion du numéro de Pratiques consacré au problème de démographie médicale et à l’opération Privés de Déserts. Il n’avait pas servi finalement. Et comme « Faut pas gâcher » et que ces derniers temps, aujourd’hui encore, des rencontres avec des « twittos » me font ressentir pleinement la richesse de ces relations, je me suis dit que j’allais le publier…Et cela évitera que si quelqu’un se connecte sur mon blog, il tombe sur mes élucubrations d’angine (d’ailleurs j’ai à nouveau mal à la gorge…)

 

Les déserts médicaux évoquent immédiatement à l’esprit les campagnes, le médecin isolé en milieu rural. Le problème de la désertification des campagnes est un réel problème et qui dépasse largement le champ de  la médecine.

Cependant, avec  l’évolution de la démographie médicale, les déserts avancent.

Je suis médecin généraliste en Seine-Saint-Denis. Je ne suis pas médecin de campagne mais je travaille dans un désert médical. La densité en médecin généraliste dans ce département est une des plus faibles au niveau national.

Personnellement, pour l’instant, cela n’a pas de retentissement sur ma pratique. Mais je sais que dans l’avenir plus ou moins lointain, cela posera problème. Et au-delà du fait de se retrouver submerger par le poids d’une  patientèle de plus en plus importante et des problèmes majeurs d’accès aux soins, ce qui me désole, c’est la méconnaissance de la richesse de cette médecine que j’affectionne.  J’aime être médecin généraliste en Seine-Saint-Denis tout simplement et je suis sûre qu’il y aurait des choses à faire pour promouvoir cet exercice.

Que  faire ? Moi, toute seule, toute petite.

J’ai écrit une thèse sur le sujet, la belle affaire !

C’est déjà un début… Je témoigne régulièrement , j’apporte un point de vue positif sur ce département très décrié. Si par mon témoignage, je peux motiver quelques jeunes médecins, si je peux faire changer la vision de quelques personnes.

Puis je suis maître de stage, je fais venir des étudiants parisiens habitués aux grands CHU dans mon petit cabinet du 93. Petite victoire.

Et moi toute seule, toute petite, j’ai des tas d’idées sur ce que l’on pourrait faire pour attirer les médecins dans mon désert médical.

Et puis, un jour, je suis, c’est une autre histoire, sortie de l’obscurantisme et j’ai découvert la médecine 2.0. J’aurai de nombreuses choses à dire sur tout ce que cela m’apporte.

J’ai maintenant un blog. Je parle de beaucoup de choses mais un de mes objectifs principaux est de témoigner de mon affection pour la médecine générale notamment  en Seine-Saint-Denis. J’apporte maintenant mon témoignage à une plus grande échelle. Je sais par les retours que je touche quelques personnes au moins : une goutte d’eau de plus dans l’océan.

Je ne fais pas de pub, je ne dresse pas de tableau idyllique. Je raconte simplement mon quotidien, un quotidien méconnu de tous, un quotidien méconnu des étudiants en médecine à qui l’on ne raconte pas ce que c’est que la médecine libérale, la mienne ou celle des autres…

Parce que dans toutes les petites idées que j’ai, moi toute petite et toute seule, celle qui est à la base de toutes les autres, c’est de faire connaitre la médecine générale aux étudiants en médecine. Oui cela n’est pas une idée lumineuse, cela parait l’évidence même…et pourtant ….

Pourtant, la médecine générale reste encore méconnue dans nos études hospitalo-centrées. Mon blog et celui des autres, ah ben oui, parce que c’est ça qui est chouette, nous sommes de plus en plus à témoigner de notre médecine, est d’abord un témoignage et ensuite un échange. Parce que  la médecine 2.0, c’est l’échange, l’échange entre confrères, entre professionnels de santé, entre patients.

Le poids de la blogosphère médicale est de plus en plus important et c’est quelques gouttes dans l’océan en plus. Une diversité d’opinions, de visions, d’expériences  qui ont j’aime à penser un impact constructif et positif.

Et puis, ma vision de la médecine générale, mes petites idées, à moi toute petite , toute seule, je m’aperçois qu’elles sont partagées par d’autres. Et puis certains en ont d’autres des idées, me les font partager et je les trouve intéressantes, on échange, on discute.

On se retrouve à plusieurs, autour d’idées communes, beaucoup de ces idées ne sont pas novatrices, d’autres le sont.

Alors, que pour beaucoup, nous ne nous sommes jamais vu, nous élaborons un projet ensemble, dans la concertation et le respect mutuel.

A plusieurs, nous sommes plus forts. Je suis toujours petite, mais plus toute seule et l’ampleur de l’opération « PrivésDeDésert » me surprend.

Il y a d’autres façons, que j’admire de faire changer les choses, que je respecte et que j’admire comme le syndicalisme ou la politique.

Mais il se trouve que moi, nous, nous avons pris, par l’évolution de nos parcours, celle là. Nous avions envie de témoigner de notre amour de notre métier, de notre angoisse devant l’évolution de sa pratique et de donner nos idées à  nous, simples acteurs de terrain.

Nous avons été entendus, nous allons être écoutés et cela c’est grâce à la force surprenante du web 2.0, grâce à nos blogs, grâce à twitter, des outils maintenant incontournables.

Davantage de gouttes d’eau dans l’océan.

Je ne suis plus seule.

Peut-être que grâce à nos actions, un jour, mon désert médical n’en sera-t-il plus un (Oui parce que tout ça m’apporte également de rêver un peu parfois).

Et un jour, je serai grande et je devrai prendre plus de  choses en main. Je serai alors enrichie de ces lectures, de ces rencontres  et de ces échanges.